Histoire 2 > la chambre
C'est pas du nouveau, ça, je l'avais déjà postée sur mon LJ cett histoire mais comme c'est plus des fics sur le lj je préfère la mettre ici ^^
Enfoncée dans son fauteuil, Meiko leva les yeux vers la porte, en face d’elle. Elle observa un instant son compagnon, son seul ami dans cette maison si sombre et banale.
« Dis, tu crois qu’on va partir ? »
Pas de réponse. Il n’y a jamais de réponse de la part de celui-là. Mais la gamine s’en moque. Elle n’a besoin d’aucune réponse. Juste de parler, de se confier. Encore et toujours. Dans un sens, quelqu’un qui ne vous parle pas, c’est assez bien, non ? Il n’émet aucun jugement, aucun avis, il ne vous critique pas. Il vous laisse parler, simplement, sans jamais vous interrompre. Des bruits de pas résonnent dans le couloir, et Meiko se redresse, inquiète. Les pas s’éloignent mais la jeune file n’ose pas bouger. Sa langue se met à claquer contre son palais, et ses yeux scrutent la pièce a la recherche d’une occupation. En vain. Cette pièce est vide, aussi vide que triste. Le matelas est posé à même le sol, et les draps colorés ne feraient même pas un bon refuge. Les volets, fermés en plein jour, ne laissent s’infiltrer dans la petite chambre que quelques rares rayons de soleil. La lampe de chevet décorée par des dessins d’éléphants est la plus grande source de lumière. Elle est jolie, mais Meiko ne l’aime pas. Comme elle n’aime pas cette pièce, d’ailleurs.
Elle reprend son monologue
« Tu vois, je ne comprends pas. Pourquoi des éléphants ? J’aime les éléphants, tu sais. Mais pas ceux là. Je ne sais même pas pourquoi. Ils sont moches, c’est tout. »
Elle soupire, puis déclare
« Ce lieu tout entier est moche de toutes façons. Je ne l’aime pas. » En même temps qu’elle baisse le ton, elle baisse doucement la tête, puis ajoute, sur le ton de la confidence « Pour être honnête, toi non plus, je ne t’aime pas, tu sais ? »
Meiko relève la tête et regarde l’autre un moment. Pas de réaction. Même pas un rictus de mépris ou de lassitude. C’est un test. Est-ce qu’il le sait, lui ? Meiko n’en sait rien. Il ne lui en a jamais parlé. Elle parle, il écoute. Ou du moins, il semble écouter. La jeune fille reprend son examen des lieux. Son bureau est dans un coin de la chambre. « Un joli petit bureau pour une jolie petite fille » lui avait dit son père en le lui achetant. Ce bureau, elle ne l’aime pas. Il est laid. Comme elle, d’ailleurs ! Son regard croise le miroir.
« Il faut être juste. Je ne suis pas vraiment laide. Oh ! Je sais bien ce que tu penses ! Tu te dis ‘Meiko est une gamine prétentieuse’. Je le sais, tu vois ? Mais soyons réalistes. Toi comme moi, nous savons que je suis la plus jolie des deux. Toi, tu es… tu es toi, quoi ! Tu es là pour moi, alors il t’est inutile d’être beau. Pour moi, c’est important. »
Elle sourit. Un léger sourire qui étire doucement ses lèvres roses. Elle fait un signe de la main a son reflet dans le miroir qui le lui rend, puis elle rit, doucement.
« Vois-tu, mon reflet est plus poli que toi. Je lui fais un signe, il me répond. Toi, on dirait que tu m’ignore. Pourtant, je le sais bien, que tu m’aimes ! »
Elle soupire de nouveau. Cette attente est trop longue. Elle ne sait plus trop quoi penser. On lui a bien dit de se tenir prête, mais on ne lui a pas dit pourquoi. Est-ce si évident ? Meiko s’interroge. Elle ne sait pas vraiment, mais elle sait qu’elle le devrait. Encore une fois, elle demande
« Dis, tu crois qu’on va partir ? »
Toujours pas de réponse. L’enfant lève les yeux au ciel, d’un air las, comme une mère qui s’ennuie des facéties de son enfant. Un moment passe encore, de nouveau des pas dans le couloir, puis de nouveau le silence.
« Je me demande ce qu’on fera, si on sort ? On mangera une glace, tu crois ? »
Elle regarde son compagnon et ronchonne
« Tu m’énerves, à la fin, à ne jamais répondre ! »
La jeune fille croise les bras sur sa poitrine puis fait la moue, comme pour faire réagir son ami. Le silence s’installe, et elle recommence son manège, claquant de nouveau sa langue contre son palais pour emplir la pièce de petits bruits réguliers. Elle jette un coup d’œil furtif en direction de l’autre, et hausse les épaules, cessant de bouder.
« Je m’ennuie. Je voudrais qu’ils se dépêchent, un peu. Ah ! Je les entends qui approchent. Tiens-toi prêt, compris ? »
La porte s’ouvre sur une femme souriante.
« Meiko ? Ton père est là. »
La jeune femme éteint la lumière et ouvre les volets, laissant le soleil inonder la pièce, rendant aux objets leur beauté naturelle. Aussitôt, esquissant à peine un sourire, l’enfant se lève et agrippe le bras de son nounours et sort de la pièce, suivit de la jeune femme qui pose la main sur son épaule pour la diriger. Regardant la peluche, Meiko souffle.
« Tu vois, c’est parce que tu ne dis jamais rien que les gens t’oublient, comme ça. »